Une guerre de gauche ?
Pour la paix à travers le droit, Bernard Ravenel, éditions Golias
extraits

 
 

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"L'élimination de la guerre est notre problème dominant. C'est un problème de politique internationale, et le plus important instrument de politique internationale est le droit international" (Hans Kelsen, la paix à travers le droit, 1944)

Dans l'unique contribution consacrée au pacifisme publiée par Le Monde pendant les 78 jours de frappe, l'auteur rappelle d'abord qu'avoir été pacifiste "à l'épreuve des guerres impérialistes c'était effectivement affirmer le primat du droit sur la force". Mais, ajoute-til immédiatement : "les guerres d'aujourd'hui ne ressemblent pas toutes à celles d'hier, par conséquent sur le Kosovo l'intervention militaire constitue, c'est l'évidence même, le seul moyen pour protéger une population exposée à un risque majeur."

Raccourci audacieux qui nous permet d'aboutir à ce qu'on pourrait appeler en ces temps d'oxymores un "pacifisme militaire"... En réalité le problème n'est pas celui du pacifisme en France tel qu'il est et tel qu'il est trop facilement dénoncé. Le problème est celui d'une réflexion sur la crise du pacifisme et sur la nécessité/possibilité d'un mouvement pour la paix adapté aux nouvelles réalités du temps de la globalisation. On l'a bien vu, le pacifisme "classique" - qu'il faudrait différencier - a vécu. [...]

Partons du postulat, en dehors de toute autre considération, que le choix de l'attaque militaire de l'OTAN s'est fondé sur une politique de défense des droits humains. Il faut donc prendre acte que ce choix, contraire à la Charte des Nations Unies, s'accompagne, du fait même de cette limite, d'une tentative d'instaurer une nouvelle règle, laquelle apparaît nécessaire. [...]

Selon Cassese-Veltroni, ancien professeur de droit international et juge au Tribunal Pénal International pour l'ex-Yougoslavie, l'intervention armée d'un Etat pour la protection des droits humains ne devrait être estimée légitime dans le nouveau droit international à construire que si sont réunies cinq conditions bien précises :
1) si l'Etat contre lequel la force est employée a violé de façon très grave , massive et répétée les droits de l'homme fondamentaux
2) si le Conseil de sécurité a sommé plusieurs fois sans résultat cet Etat de mettre fin aux massacres
3) si toutes les tentatives d'une solution diplomatique pacifique sont demeurées vaines
4) si l'emploi de la force est le fait d'un ensemble d'Etats et non d'une seule puissance et si la majorité des Etats de l'ONU n'est pas opposée à un tel usage
5) si le recours à la guerre reste la seule solution face à la poursuite des massacres par l'Etat responsable

[...]

Pour sa part, Walter-Veltroni écrit : "la paix, pour être vraie, doit être juste : fondée sur le respect des droits humains fondamentaux. Autrement, celle-ci n'est pas une vraie paix et peut même devenir indulgence et abdication, hypocrite et vile, devant l'injustice, l'abus de pouvoir, l'oppression. La paix juste est l'objectif vers lequel tend la nouvelle gauche démocratique. [...] Une gauche qui cherche dans l'éthique des droits humains les paramètres d'un nouvel internationalisme."

[...]

Il ressort de la nouvelle situation engendrée par cette (double) guerre, la nécessité pour le nouveau droit international en gestation de remplir deux conditions : d'abord de garder le meilleur de l'héritage de la culture juridique internationale du XXème siècle avec en particulier le tabou de la guerre ; ensuite remettre en cause le principe de Nation. Sur cette question il faut rechercher un fondement - d'inspiration fédéraliste ? - plus large qui puisse être reconnu comme universel avec une culture des droits humains qui dépasse l'idée même de souveraineté nationale et de citoyenneté séparées.

Epilogue : 1914-1999 : la gauche et la guerre

Août 1914 : déclenchement de la Première Guerre Mondiale [...]

Mars 1999 : déclenchement de la guerre de l'OTAN en ex-Yougoslavie [...] Toute la grande presse soutient avec détermination et parfois avec enthousiasme cette guerre présentée comme humanitaire qui doit rétablir les droits humains.

Politique du moindre mal